Le Comité de soutien aux « 4 de Tours » communique :

Procès politique et police des mots…

Depuis le début de ce procès, il était évident que sous couvert de
diffamation, le ministère de l’Intérieur ne cherchait qu’à interdire aux
militants solidaires des sans-papiers de pratiquer librement leur devoir
d’alerte, lequel peut consister, entre autres, à établir des comparaisons
historiques, fût-ce avec les périodes les plus noires de notre histoire.

Ce procès n’est rien d’autre qu’une tentative pour masquer un procès
politique sous les apparences d’un délit de droit commun : une diffamation.
Cette tentative a volé en éclats une première fois, à l’audience du 5 avril
2011 du Tribunal Correctionnel de Tours, sous l’effort conjugué des prévenu-e-s
et des multiples témoignages qui, les uns après les autres dans leur diversité,
leur richesse et leur complémentarité ont tissé, heure après heure, une longue
chaine d’évidences : qu’ils émanent d’historien, de juriste, de psychanalyste,
d’enseignant, d’étudiant, d’anthropologue, de militant, de « témoin de l’Histoire », tous les témoignages
avaient concouru à dire l’insupportable, l’inacceptable, en un mot
l’infamie du présent : l’infamie de la chasse à l’enfant, l’infamie de
la chasse àl’étranger qui se déroule actuellement sous nos yeux et qui fait
écho, -pourquoi le nier- à d’autres chasses à l’homme si vivaces encore dans
nos mémoires.

Pour la 2ème fois, le 30 janvier 2012, cette fois à la Cour d’Appel
d’Orléans, cetteextraordinaire démonstration a été faite, avec la même
qualité d’analyse et la même force. Pour la 2ème fois donc, ce procès apparaît
bien pour ce qu’il est :
un procès politique !

D’autre part, une 1ère fois, le 5 avril, le Procureur de Tours avait admis
une »nullité de procédure » : il ne pouvait plus maintenir la poursuite sur le
1er chefd’inculpation relatif à la distribution du communiqué de presse…
en raison des erreurs sur les faits et dates contenues dans sa citation à
comparaitre !

Il reconnaissait également aux prévenu-e-s d’être de bonne foi, et parmi
les 4 critères de la « bonne foi » qu’un tribunal peut exiger d’eux, et qu’on
pouvait leuraccorder, à coup sûr, les 2 premiers, à savoir la poursuite
de  » l’intérêt légitime » et « l’absence d’animosité ».

Le 30 janvier 2012, le procureur général de la Cour d’Appel d’Orléans a
posé lui aussi qu’il ne poursuivait plus désormais que sur la diffusion du
communiqué surinternet. Il a dit également admettre la bonne foi des
prévenu-e-s sur les 2 critères cités précédemment. Il demandait en outre au
tribunal d’Appel de confirmer la relaxe de l’une des 4 prévenu-e-s.

Ainsi, petit à petit, le contenu des charges qui pèsent sur les militants
diminue. Le Procureur d’Orléans a même souligné qu’il requiert avant tout des
« peines de principe », sans plus de précision… si ce n’est une invitation
à confirmer les peines infligées par le tribunal de Tours.

Désormais le CONTENU POLITIQUE du procès s’impose de plus en plus, rendant
chaque fois plus difficile le maintien de la forme juridique – le délit de
diffamation – dans laquelle on tente de le circonscrire.

La présidente de la Cour d’Appel a d’ailleurs posé d’entrée de jeu la nature
politique de ce procès…pour mieux demander qu’on s’oblige à respecter le jeu
juridique. Aussi plus personne n’est dupe.

Il est d’ailleurs d’autant plus intéressant de voir de plus près comment a
été argumenté le motif de diffamation, cela permet de prendre la mesure des
restrictions actuelles à la libre expression des citoyens :

Il est reproché aux prévenu-e-s de n’avoir pas fait d’enquête suffisamment
précise et approfondie, sur le modèle des enquêtes des journalistes et selon
les exigencesqui sont habituellement posées à ces professionnels !
Un simple citoyen doit-il désormais être un professionnel de l’information
pour pouvoir s’exprimer ?

On leur reproche également, bien que de bonne foi, d’avoir passé les clous
(« d’avoirpassé le droit ») du fait du caractère « outrancier » de leur propos à
l’encontre decertains fonctionnaires préfectoraux : ils ont non seulement
évoqué Vichy mais, pis encore, parlé de « nervis de Vichy ». On a appris alors
qu’il avait été établi par certains jugements de la Cour de Cassation que
seuls les propos échangéspar des « hommes politiques » pouvaient échapper à
l’obligation de modération qu’on tente d’imposer à nos camarades !

A noter, au final, que c’est même essentiellement sur ce motif de propos
immodérés qu’ils sont désormais incriminés !

Ainsi il y aurait à distinguer entre les « hommes politiques » reconnus
comme tels,patentés en quelque sorte, et les militants et citoyens ordinaires qui,
eux,tomberaient sous le coup de la loi s’ils parlent politique librement et
s’autorisent certaines comparaisons historiques !

Parler politique sans… modération (!) devient donc le droit (l’affaire et
le précarré !) de quelques personnes seulement, les professionnels de la
politique institutionnelle !

Et ainsi, pénaliser le fait de parler de Vichy, ce serait moins, pour le
tribunal, une question de référence historique que le fait de souligner
le caractère outrancier et outrageant du propos en question ! Juste une affaire
de modération de langage en quelque sorte !

Belle démonstration de toutes les subtilités auxquelles peut conduire la
volonté POLITIQUE de transformer un propos politique en un « fait diffamatoire »
et d’instituer – ce faisant – une véritable police des mots !

Belle démonstration surtout de ce que peut être un procès politique de nos
jours lorsque se met en place la judiciarisation du politique et son corollaire
: la pénalisation, la criminalisation des militants et tendanciellement de tous
les citoyens qui osent parler librement !

Oui, monsieur le procureur général, il s’agit bien de principe. Vous
affirmez, pour nos camarades, la nécessité d’une « peine de principe »
et vous ajoutez :
« les combats de principe, ce sont les plus beaux » !

En effet, monsieur le procureur général, et le principe auquel nous
tenons, nous,précisément, c’est qu’il ne saurait y avoir… aucune peine.
Il en va de la liberté d’expression ! Prononcer une peine, fut-ce la plus
légère, c’est encore…pénaliser et c’est précisément ce que nous récusons
depuis le début.

Ce n’est pas un tribunal qui doit dire quelles sont les références
historiques que tout citoyen a le droit et parfois le devoir d’invoquer !
Quelles que soient les arguties avancées, ce tribunal sera comptable d’avoir
PENALISE le fait de faire certaine référence historique.

Ce n’est pas un tribunal qui doit définir ce qu’est un propos politique,
ni qui a le droit de le tenir !

Nous demandons au tribunal de TENIR SON ROLE qui est, ici, de garantir la
libertéd’expression! Il ne saurait y avoir pour nous d’autre verdict acceptable
que la RELAXE des 4 de Tours !

C’est le 26 mars à 14h à Orléans que la Cour d’Appel fera connaître sa
décision.

Le Comité de soutien aux « 4 de Tours », le 01 février 2012
Contacts : Patrick Bourbon : 02 47 63 27 06

Josée Benoit : 02 47 61 51 08
http://baleiniers.org

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