http://www.non-fides.fr/?Cher-bobo-prends-tes-flics-et
Edito de Lucioles n°9, bulletin anarchiste de Paris et sa région, mai 2013.
Tu les vois fleurir les galeries d’artistes, les bars où ces maudits
viennent s’abreuver de gobelets en plastique sur les trottoirs, ces
mangeurs de merde en costard qui font visiter des apparts dont les loyers
feraient exploser la tête de ton banquier, ces abrutis de journalistes
venant filmer pour la deuxième partie du 13 heures comment qu’on est
pittoresques nous les pauvres, les ânes en uniforme qui patrouillent dans
le quartier pour s’assurer que la rencontre du troisième type entre
galériens et bourges ne soit pas trop explosive… Voila qu’après nous
avoir parqués dans des ghettos de pauvres, on nous insémine du ptit bourge
à la pelle et du flic au quintal, voila même qu’on voudrait nous virer,
nous jeter un peu plus loin dans les oubliettes à pauvres des cités en
attendant de nous trouver une poubelle galactique. Ceux qui se la pètent
appellent ça la gentrification, nous on appelle ça LA GUERRE.
Mais quand on veut la guerre, on finit par l’avoir. Faut croire que
certains villageois ne se rendent et ne se rendront pas. Le pouvoir et sa
flicaille n’arrivent pas tant que ça à nous civiliser. Il y a tant de
petites attentions modestes, discrètes et quotidiennes qui leurs sont
offertes. Ces petites choses de la vie qui foutent la patate et un bon gros
sourire aux lèvres. Là une bande de flics qui se prennent des œufs pourris,
des insultes et des pots de fleur sur la gueule, à côté un mur peint de
doux torrents de haine dirigée à l’encontre des puissants, ailleurs un
distributeur de banque défoncé à la masse, un commissariat aux vitres
blindées bleu blanc rouge pas si blindées que ça (as-tu déjà fait un tour
du côté de la rue Ramponneau ?). Et puis cet artistouille en pantoufles qui
passe la journée sur son Mac derrière la vitrine de sa galerie d’art de 100
m² aux murs blancs, qui se retrouve avec des bouts de sa vitrine sur le
clavier ? Et ces caméras là, qui pensaient pouvoir nous intimider de leurs
regards discrets et imposants, en mille morceaux par terre pour l’une,
couverte de suie pour l’autre ou encore couverte de peinture ou
d’autocollants ! Puis cette magnifique baffe dans la gueule du bobo qui
nous empêche de circuler vaut bien celle dans la gueule du flic qui nous
force à circuler.
Rien n’égale ce petit brin de pagaille, ce bordel permanent, le désordre
incontrôlé qui offre aux propagateurs du chaos, aux rebelles, aux amants de
la liberté, une base fertile pour l’attaque et la diffusion de la révolte.
Non, on n’est pas tous des zombies, prêts à s’agenouiller pour lustrer vos
mocassins, tendant l’autre main pour que vous y passiez vos menottes,
tendant l’autre joue en signe de dévotion. Nous entendons être libres et
sauvages, et vous aurez beau nous dépeindre avec des couteaux entre les
dents, nous appeler les « barbares », les « bandes », les « incontrôlables », les
« casseurs », les « saboteurs », la beauté est de notre côté, dans la rage d’en
découdre avec ce monde, ses institutions, et ses rapports pourris d’argent
et de concurrence entre les individus.
Nous n’entendons plus écouter vos sérénades de politiciens-violonistes, car
nous ne voulons ni de vos droits ni de vos devoirs, ni de votre sécurité ni
de votre contrôle, et encore moins de vos promesses. Vous nous parlez de
« zone de non-droit », nous répondons « pas assez ». Vous nous parlez de
« zone urbaine sensible », nous répondons « oui, nous sommes de petits
êtres sensibles, et c’est pour ça qu’on va niquer votre sécurité ». Parce
que la « mixité sociale » de leur rêve, c’est la paix des riches et la
guerre aux pauvres.
Alors sans trêve, sans reddition, sans pitié, seuls ou entre amis,
continuons à renforcer la guerre aux riches et à leurs laquais, à leur
propriété, leurs flics, leurs juges, leur paperasse, leurs galeries d’art
subventionnées et leurs cafés branchés.
Qui sait… Peut-être que sur ce chemin nous apprendrons à faire la
révolution ?
[Edito de Lucioles n°9 http://luciolesdanslanuit.blogspot.fr/search/label/Num%C3%A9ro%209,bulletin anarchiste de Paris et sa région, mai 2013.]