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Nous ne savons pas trop comment prendre les titres de la Nouvelle République « Squat rom à L’Étape » et « Squat rom ». Nous espérons qu’il s’agit seulement, comme le font certaines autres organisations, d’insister sur la spécificité des roms : une situation qui est plus déplorable et scandaleuse que celle des « sans papiers ». Il se trouve toutefois qu’aujourd’hui il n’y a pas de spécificité de la misère. Car depuis mardi dernier, une famille azerie-arménienne avec deux enfants de 2 ans et 7 ans malades (la petite fille de 2 ans est épileptique), et depuis jeudi dernier un père séparé arménien et un homme seul géorgien sont venus habiter sur place.
Pour le Dal86, il s’agit donc simplement de personnes et de familles qui se trouvaient à la rue. Pour des raisons historiques et contextuelles, il s’est trouvé qu’au début il y a eu des roumains dont certains sont roms. Mais nous savions que d’autres familles vivaient des épreuves épouvantables et allaient nous rejoindre.
Nous savons aussi que l’accueil d’urgence et les solutions de logement sont fortement déficients. D’abord, malgré ce que prévoit la loi, l’accueil inconditionnel n’est pas assuré à cause du manque de places – des personnes seules et des familles se retrouvent régulièrement à la rue. Nous pouvons lire dans le Plan Départemental d’Action pour le Logement des Personnes Défavorisées du département la Vienne 2012 – 2016, « au 31 août 2010, la synthèse régionale des PDAHI réalisée en Poitou-Charentes fait apparaître le bilan quantitatif suivant pour le département de la Vienne : Urgence : 39 places installées, dont 30 en CHRS ». Même s’il y en a autant aujourd’hui, ce qui serait à démontrer, c’est manifestement insuffisant puisque déjà 24 personnes habitent le squat de l’Etape et que nous nous attendons ces prochains jours encore à plus d’une dizaine. D’autre part, rien que l’association Dal86 connaît, y compris les personnes du squat, 26 familles, un couple et 3 personnes seules sans logis ou dans des situations de logement très précaires – 104 personnes dont 64 enfants de quelques mois à 17 ans et 3 femmes enceintes. Il faut se rendre à l’évidence, les 39 malheureuses places d’urgence, ne pourront pas héberger tout ce monde.
Ensuite, malgré la loi qui prévoit un « accueil digne », les locaux du CHUS sont très vétustes et la vie en dortoirs sépare les couples et les familles. Malgré la loi qui prévoit un accueil continu, les personnes et les familles doivent sortir à 10h30 le matin et ne pas y revenir avant 16h15 et pas après 21h, et, si les femmes et les enfants sont hébergés tous les soirs, le manque de places fait que les hommes « tournent » et ne sont hébergé qu’un jour sur deux voire, qu’un jour sur 3 ou 4. Malgré la loi qui, outre le gîte et l’hygiène, prévoit le couvert, il n’y a pas de repas servis le soir ni a fortiori le midi. Malgré la loi qui prévoit une première orientation « vers tout professionnel ou toute structure susceptibles de lui apporter l’aide justifiée par son état », un accompagnement personnalisé et une seconde orientation « vers une structure d’hébergement stable ou de soins, ou vers un logement, adaptés à sa situation » les personnes et les familles sont livrés à eux-mêmes et il est certain que des familles subissent ces mauvais traitements durant 2 longues années, le maximum étant 3 ans.
Nous pourrions multiplier les exemples. Nous n’en donnerons qu’un, cette famille azerie-arménienne, qui est arrivée mardi dernier au squat de l’Etape, a été hébergée dans un premier temps par la Croix Rouge au CHUS « 115 ». Puis dans un CHRS et lorsqu’elle a été déboutée de sa demande d’asile, la Croix Rouge lui a demandé de partir et l’a mise à l’hôtel. Puis, la Croix rouge leur a demandé de trouver quelque chose par eux-mêmes car il n’y avait pas de place au CHUS « 115 » – chose facile c’est sûr pour des personnes parlant et comprenant mal le français, – et de partir de l’hôtel vendredi 12 avril. Une place au CHUS « 115 » a malgré tout été trouvée à l’arrache la veille par la Croix Rouge après l’intervention du Dal86. Vu les conditions de vie lamentables au CHUS « 115 » et les maladies des enfants, la famille a laissé quelques affaires et est partie chez un ami à Saintes. Lorsqu’ils ont voulu revenir mardi dernier, ils n’avaient plus de place au CHUS « 115 » et étaient à la rue. Heureusement alors qu’il y a eu le squat l’Etape pour les mettre en sécurité.
Cette situation catastrophique du CHUS est démultipliée par l’incapacité du SIAO (Système Intégré d’Accueil et d’Orientation) à orienter correctement et rapidement les personnes et les familles qui devraient rapidement sortir du CHUS comme c’est stipulé dans la loi. Il y avait, il y a quelques mois, une liste d’attente d’une centaine de noms. Combien y en a-t-il aujourd’hui ?
Alors nous hallucinons lorsque les adjoints du maire de Poitiers déclarent que les locaux du squat l’Etape « ne répondent plus aux normes applicables à ce type de site d’hébergement. » Non seulement il n’y a pas photo si nous comparons ces locaux à ceux vétustes de la Croix Rouge, mais la situation dans le squat de l’Etape est infiniment meilleure que de coucher et de vivre dans la rue.
Nous hallucinons aussi lorsque « les trois élus notent que ces familles occupent des locaux potentiellement dangereux. Une situation signalée au conseil général du fait de la présence de nombreux enfants. » Comment madame Laprie et messieurs Berthier et Bonefon peuvent-il se permettre de proférer se telles menaces dignes de la pire espèce des manipulateurs ? Car, vu la situation scandaleuse dans laquelle se trouvent ces familles et leurs enfants, et l’état déplorable de l’hébergement d’urgence et du SIAO, ils sont autant en sécurité dans le squat l’Etape qu’au CHUS – tout en constatant qu’ils ont, au squat, des conditions de vie beaucoup plus conformes à la dignité humaine qu’au CHUS – et ils sont infiniment plus en sécurité dans le squat que dans la rue.
Concernant le conseil général, qui rappelons-le, en fait de protection de l’enfance, dénonce les vrais faux majeurs étrangers à la « police républicaine » pour les faire expulser. Dal86 a accompagnés plusieurs fois des familles avec des enfants à l’ASE, qui là aussi, en fait de protection de l’enfance, ne se préoccupe que des déficiences parentales et a toujours refusé de prendre en charge les familles que nous lui avons amenées. L’ASE n’a jamais rien voulu savoir nous disant que l’absence de logement n’était pas une maltraitance des enfants et que la solution relevait donc de la préfecture. L’ASE a même laissé partir plusieurs fois, sans leur proposer une prise en charge, des familles ayant des enfants, y compris en bas âge, alors qu’ils savaient très bien qu’ils partaient coucher dans la rue.
Soyons clairs, si le Conseil Général lève ne serait-ce que le petit doigt concernant la supposée « insécurité » dans laquelle seraient les enfants dans le squat l’Etape, nous viendrons illico à l’ASE, les familles du squat et les autres soutenues par le Dal86 et les autres orgas, pour exiger une prise en charge pour tous.
De la même manière, si la municipalité assigne les familles du squat l’Etape au tribunal, nous viendrons illico à la mairie, les familles du squat et les autres soutenues par le Dal86 et les autres orgas, pour exiger l’annulation de la procédure.
Un toit c’est un droit avec ou sans papiers