Un an et demi qu’on nous emmerde,
des nouvelles de l’affaire de Labège
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Le 14 mars aura lieu le procès pour les refus d’ADN suite aux arrestations
du 15 novembre 2011. C’est le moment pour nous de faire un petit point sur
plus d’une année sous mains de justice. Plus d’une année d’écoute, de
filature, de contrôle judiciaire… bref des mois d’emmerdes. Des emmerdes
pour les personnes directement impliquées dans l’affaire mais aussi
tou.te.s leurs proches, ami.e.s et connaissances.
Nous prenons la parole, nous qui aimerions nous occuper de bien d’autres
choses que d’accusations fumeuses et de leurs conséquences.
Mais pourquoi tout ça au fait ?
Le 05 juillet 2011, en fin de matinée, un groupe d’individu.e.s s’est
invité dans les locaux de la Protection Judiciaire de la Jeunesse (PJJ) à
Labège (31). Iles y sont resté le temps de signifier à cette institution,
et à son personnel, le dégoût qu’elle leur inspire. En solidarité avec les
jeunes mutin.e.s qui ont osé se révolter en mai de la même année dans
l’Établissement Pénitentiaire pour Mineurs (EPM) de Lavaur, co-géré par
l’Administration Pénitentiaire (AP) et … la PJJ.
Une enquête est immédiatement ouverte. Dès le 13 juillet, le procureur de
la république Valet nomme Didier Suc, juge d’instruction pour cette
affaire. Il s’agit d’une information suivie contre X, pour des faits de :
Participation à un groupement formé en vue de la préparation de violences
contre les personnes ou de destructions ou dégradations de biens à Labège
le 5 juillet 2011
Violence commise en réunion sans incapacité à Labège le 5 juillet 2011
Dégradation ou détérioration du bien d’autrui commise en réunion à Labège
le 5 juillet 2011
Lisons donc : tags, déversement de lisier et insultes. C’est dans ce
jargon, une fois digérés par la justice, que sont retranscrits et donc
criminalisables des moyens évidemment légitimes d’affirmer sa solidarité
avec celles et ceux qui se révoltent.
Les quatre premiers mois de cette enquête sont soldés par une opération
massive de gendarmerie à Toulouse, le 15 novembre 2011.
Les flics ont perquisitionné sept lieux de vies, interpellé une quinzaine
de personnes et embarqué un paquet d’affaires. Sept personnes sont mises
en garde-à-vue, six sont présentées au juge d’instruction. Cinq d’entre
elles sont mises en examen, quatre atterrissent directement à la Maison
d’Arrêt de
Toulouse-Seysses pour 2 à 3 mois de détention provisoire. La cinquième est
dehors, sous contrôle judiciaire. La sixième reste « libre », avec un
statut de témoin assisté. Et la septième est lavée de tout soupçons grâce à
un alibi béton et vérifiable.
Jusqu’à aujourd’hui, aucune avancée, aucune nouvelle, aucune convocation,
rien, juste une menace diffuse pour les présumé.e.s coupables de retourner
en prison, pour leurs proches d’être associé.e.s à cette affaire et pour
tout le monde de voir les flics débarquer dans nos maisons. On sait aussi
que cette instruction sert à venir piocher des infos sur tout un tas de
personnes « affiliées » à la mouvance fantoche ultra gauchiste toulousaine,
et qu’on a écopé d’une surveillance continue de tous les espaces et
acteur/ices de luttes pour une durée indéterminée.
Crachez ici !
Aujourd’hui c’est le procès du refus d’ADN. C’est la punition pour avoir
refusé le fichage systématique. Triste ironie quand on sait que ce refus à
officiellement justifié les placements en détention provisoire alors que
les ADNs ont quand même été pris sur les gobelets, fourchettes et mégots
utilisés pendant les GAV. Viendront donc à la barre les cinq mises en
examen, le témoin assisté et la personne mise hors de cause. Les raisons de
ce refus sont connues mais nous pouvons les répéter encore.
Nous constatons que le prétexte de la preuve ADN sert une volonté de
fichage généralisé de la population entière. Cette découverte scientifique
qui consiste à attribuer un profil unique à chaque être vivant est
tellement complexe qu’elle en est opaque. C’est évidemment plus simple de
nous faire accepter des choses quand on y comprend rien. On nous a d’abord
dit que c’était pour ficher les « vrai.e.s criminel.le.s », les
« dangereux/dangeureuses », or ce sont près de 3 millions de personnes qui
sont maintenant inscrites à vie dans le Fichier National Automatisé des
Empreintes Génétiques. Pas de présomption d’innocence pour ces gens, il y a
les parfait.e.s et les autres, celles et ceux qui sont déjà passé.e.s par
la case GAV.
Et ça ne s’arrête pas là, ou plutôt ça n’a pas vraiment commencé par là,
les animaux non humains sont eux aussi fichés. Chaque être vivant peut donc
être identifié, géré dans une base de données, intégré dans un calcul de
statisticien, contrôlé et tracé. Un énorme marché presque intarissable car
il y aura toujours de nouvelles personnes qui naissent et des nouveaux nés
animaux. Concepteurs de logiciels de gestion, fabricants de matériel de
prélèvement et matière grise de labo s’en frottent les mains.
Outre l’aspect économique, être fiché individuellement ne concerne pas que
nous. Nos parents et enfants sont directement mis dans la case « de la
famille d’un.e présumé.e coupable » grâce à certains marqueurs qui
constituent notre profil génétique. Se dire qu’on peut passer entre les
mailles du filet pour s’en sortir un peu moins pire devient presque
impossible.
On friserait presque la récidive si nos aïeul.le.s ont commis
des broutilles hors du cadre légal. Au final, tout le monde est fiché, pas
que les « coupables », pas que les « suspecté.e.s d’un jour », pas que les
« témoins » comme la police et la justice tentent de le justifier.
Refuser que des mecs ou des nanas en bleu nous mettent un coton tige dans
la bouche est assez facile, en assumer les conséquences fait un peu peur.
On s’expose alors à des procédures judiciaires, autre espace opaque et
inquiétant de l’arsenal répressif.
On nous dit 15OOO euros d’amende et un an d’emprisonnement. En réalité les
personnes qui ne sont pas relaxées pour ce délit, car ça arrive plus
souvent qu’on ne le croie, écopent souvent d’une amende ou de peine avec
sursis. Mais même si on encourt des peines légères, être reconnu.e
coupable de ce délit veut dire risquer la récidive à chaque GAV. Quelque
soit la suspicion de délit pour lequel on y est amené. Et plus on sera
nombreu.ses.x à refuser, plus ce sera difficile de nous poursuivre…
Parmi les épées de Damoclès qui planent au dessus de nous, il y a donc ce
procès pour refus de prélèvement des empreintes génétiques, mais il y a
aussi l’instruction et ses mesures coercitives, le contrôle judiciaire en
est une.
*Du contrôle, judiciaire, mais pas que…*
Pendant que le Didier Suc cherche suffisamment d’éléments pour justifier 20
mois d’enquête, les cinq mis.e.s en examen sont sous contrôle judiciaire.
Cela va de l’obligation de résider chez les parents, de pointer toutes les
semaines au commissariat, à l’interdiction de se voir et de sortir du
territoire. Ces mesures restrictives ne sont pas les mêmes pour tout le
monde, une incohérence de plus qui prouve le caractère aléatoire et
opportuniste de cette justice. Évidemment, elle tente encore d’isoler,
d’atomiser et d’éviter toute réaction collective face à des accusations.
S’institue alors la temporalité de l’instruction, faite d’immobilisme et de
longue attente où un des moyens pour mettre en place un rapport de force
passe par le juridique. Des demandes d’aménagement et de main levée de
contrôle judiciaire sont répétées, le juge d’instruction et le parquet
maintiennent la pression. Une fois de plus on voit une procédure basée sur
des intimes convictions de juges et de procureurs voulant absolument faire
peur et faire réfléchir à deux fois avant de lutter. Prouver que des gens
sont coupables ou innocents ne les intéresse que très peu. Susciter
l’immobilisme et le formalisme, voire la résignation de tou.te.s les
pauvres et les agité.e.s, en revanche leur tient à cœur. Rester solidaires
et faire bloc ensemble est un autre moyen de lutter face à la machine
judiciaire et ne pas trop se laisser écraser.
On vous tiendra au courant quant aux suites de ces démêlées judiciaires
même si nous n’en n’attendons rien.
Nous ne sommes pas les seules dans cette situation, nous sommes bien
conscien.te.s que nous avons les moyens de nous exprimer, dans certains
réseaux et de demander de la solidarité. On aimerait juste que ces
histoires judiciaires, concernant un certain milieu, ne nous fassent pas
oublier la somme énorme de personnes qui se prennent la massue du code de
procédure pénale dans la gueule.
Un gros big up à elles et eux.
« La justice nique sa maire, le dernier juge que j’ai vu
avait plus de vices que le dealer de ma rue… »
ou
On les emmerde
Des nouvelles de l’histoire de Labège http://pourlaliberte.noblogs.org/post/2013/03/13/des-nouvelles-de-lhistoire-de-labege/